EXTRAIT 1

Bécassine où la femme émancipée, fête ses 120 ans.

Bécassine est née d'un vide!  Vide d'une page de magazine enfantin aux premiers jours de sa conception, "La Semaine de Suzette". Vide à combler dans l'éducation des fillettes, en 1905, au travers des journaux enfantins trop souvent moralisateurs et pas assez ludiques. Vide à combler, enfin, dans une épopée strictement féminine dont la lecture et le récit des exploits des femmes, se doit d'être à la portée du plus grand nombre.
Bécassine née,  il y a 120 ans, sous la plume d’Emile Joseph Porphyre Pinchon son dessinateur attitré, a toujours fait figure de paysanne gauche et naïve  la genèse de son histoire étant d’être un personnage comique. De ses origines, née Anaïck Labornez à Clocher-les Bécasses, la voilà marquée à tout jamais par les auteurs de sa vie, Jacqueline Rivière puis  Caumery, du sceau de la bêtise.
Et comme le note madame la marquise de Grand Air, dans l’album « chez les Alliés », elle fait bêtises sur bêtises. Cependant cette héroïne de bandes dessinées va tout au long des albums qui la mettent en scène, dans une société sans cesse en changements et bouleversements ( deux guerres mondiales ) être le chantre de la culture et de l’émancipation des femmes.
L’esprit caustique qui prédomine dans les courtes historiettes de Jacqueline Rivière, deviendra plus humoristique et bienveillant chez Maurice Languereau dit Caumery. La vie de Bécassine au travers des nombreux albums est une fresque historique de la société dans laquelle  vivent les petites lectrices.

Voici des petits extraits de la conférence

que j'ai présentée cette année au club d'Orléans de Poupée d'Hier et d'Aujourd'hui.

le blog ne suffirait pas à retranscrire ce que j'ai présenté,

cependant Chiffonnette très inspirée par cette héroïne a tenu à ce que je vous montre quelques pages des petits albums que je m'amuse à faire pour mes petits-enfants...

Je me suis attachée à démontrer que Bécassine est un faire-valoir incontournable,

une héroïne "très réfléchie" par ses auteurs.

EXTRAIT 2

La narration va se faire à deux niveaux, entendons par là, non pas un sens propre et un sens figuré , mais un niveau où Caumery sera l’auteur créateur de l’histoire et un autre où Bécassine par son  entremise deviendra son propre auteur. Elle s’affranchit ainsi  de Caumery en prenant la plume et en écrivant soit son journal, soit directement ses aventures adressées à ses jeunes lectrices.
Par là c’est encore une leçon d’émancipation. En effet Bécassine ne laisse pas le soin à d’autres de penser pour elle. Elle revendique par l’écriture qu’elle domine mal, la liberté de ses pensées , de ses actes et la liberté de se tromper aussi… « Il vaut mieux agir que ne rien faire ». Dans l’album  « les Cents métiers de Bécassine », elle se laisse tenter par la modernité du stylo-plume, et là, encore une fois, sa maladresse est au service de sa curiosité et une leçon d’ouverture d’esprit. Bécassine se tache, renverse de l’encre, gâche du papier…Malgré tout elle reste maîtresse d’elle même et continue d’être autrice de ses faits et gestes.

EXTRAIT 3

Bécassine sera nourrice… deviendra fonctionnaire, pour ne pas rester à ne rien faire et à dépendre des biens de la marquise .
Pendant la grande guerre, elle sera mobilisée. Madame la Marquise de grand Air, ne peut plus garder à son service Bécassine car vivant de rentes, elle doit restreindre son train de vie.
Bécassine apprend donc qu’elle peut être utile à la société, en travaillant, pour l’état.
Elle sera embauchée entre autre comme receveuse de tramways à Versailles, et vivra de folles aventures , découvrira somme toute le monde, en rencontrant des gens tous plus différents les uns que les autres qui empruntent cette ligne de tramway; quittant ce poste pour une bévue, elle en trouvera un autre dans l’administration, apprendra ce que sont des ventes aux enchères, le métiers de secrétaire, au travers du classement de dossier, d’écriture de formulaires et à s’habituer à différents employeurs et chefs de service.

il y a la narration à deux niveaux et l'illustration de même... Les dessinateurs de Bécassine, Pinchon et pendant la mobilisation de Pinchon, Zier, la mettront en scène , bien évidemment, mais lui laisseront aussi dessiner ses aventures ou, illustrer ses pensées.

EXTRAIT 4

Les dessins des albums de Bécassine, resteront tout au long de leurs longues années de parution, jusque dans les années 50, fidèles à la création du personnage de Bécassine. Les auteurs s'amusent à l'enlaidir, à l'embellir, à la manipuler et la montrer dans des situations cocasses, désespérées ou encore réalistes. La ligne claire la simplicité leur permettent de passer la main à leur héroïne pour un mouvement de va et vient qui anime les histoires et rendent les albums vivants comme une sensation filmique. Ils leur est aisé de passer la main à leur personnage, ainsi Bécassine se mettra elle même en scène pour prendre la main sur son destin. 

EXTRAIT 5

Conclusion

Bécassine en sortant de sa condition féminine et sociale, au travers de toutes les aventures vécues, par ses prises de décisions, parfois rocambolesques, va défier les codes sociaux et remettre en cause les "a priori" de la société dans laquelle elle vit. En sortant du « droit chemin » et en allant toujours vers plus de soif de connaissance , pour appréhender le monde , elle s’émancipe , peut décider de plus en plus souvent de son sort . Et si au début de sa vie de petite  bonne qui sert à combler un vide dans un journal , déclarée idiote , (dès 1906, on voit qu’elle sait écrire cependant), elle devient une héroïne de bandes dessinées, c’est bien parce qu’elle est porteuse de ce message important: l’éducation ouvre les voies de la liberté, et permet par la confrontation aux idées , par le débat, de trouver la force de réaliser ses aspirations.
Elle était vouée à une vie de petite servante moquée et mal considérée, et est devenue l’archétype de la femme libérée.

Voici Chiffonnette en Bécassine, et Madame de Grand Air

prêtes à partir en promenade,

comme dans l'album préféré de mes petits-enfants et de moi-même.

Sur cette photo prise à Orléans par un membre du club,

Bécassine-Chiffonnette a ôté ses sabots de pêcheuse et rangé son seau -car elle entretient avec un soin extrême son automobile -  afin de conduire sa "maîtresse" chez une amie.

Chiffonnette-Marquise un peut plus ronde et coiffée de son chignon et de ses "marteaux", en mohair,

porte une montre, une bague au doigt, car elle a des doigts, et un sautoir de perles.

Elle est vêtue d'une robe de soie faite d'après un modèle de la semaine de Suzette.

(dès que je trouverai 5 minutes je ferai des photos de la marquise...)

Chiffonnette-Marquise vous adresse son meilleur souvenir.